Comme
tous les amateurs de Science-Fiction, le film Blade Runner m’a toujours
fasciné, par son ambiance néo-noir, son esthétique incroyable, sa musique
fascinante et ses questionnements sur le cœur de l’humanité. Je me souviendrai
toujours de la scène finale et de l’affrontement, avant tout métaphysique,
entre Deckard, joué par Harrison Ford, et Roy, incarné par Rutger Hauer. C’est
un chef d’œuvre, l’un des très rares films qui vont, à mon sens, au-delà du
livre dont ils sont tirés.
Ainsi
Denis Villeneuve, que j’ai découvert avec Premier Contact, film bon mais
imparfait, avait une sacrée pression. Égaler Ridley Scott (à l’époque où le
réalisateur faisait du cinéma j’entends) n’est pas mince affaire. L’équipe du
premier film n’était pas bien loin cependant, entre Harrison Ford et Hampton
Fancher, le scénariste qui a repris du service. Comme on sait à quel point l’écriture
d’un film est vitale, le voir au scénario a toute son importance.
Résultat ?
Et
bien je dois avouer que ce Blade Runner 2049 est un petit joyau. Pourtant ça
commençait fraîchement : la scène d’ouverture est en effet plutôt faible
visuellement, en comparaison du premier film qui nous plongeait directement
dans son monde urbain, mais elle est utile pour le scenario et nous laisse un
répit avant de découvrir le Los Angeles de Villeneuve, une ville tentaculaire
et aux multiples verticalités, que nous verrons longuement dans le film. Car
oui, c’est l’une des forces de ce film, les visuels sont absolument
magnifiques, des œuvres d’art dynamiques, qui flattent l’œil et ouvrent l’esprit
par leur grandeur et leurs détails. Je ne me souviens pas avoir déjà autant apprécier
un film visuellement. Ce travail magistral se mêle à merveille avec le rythme
lent du film, nous laissant vraiment le temps de nous perdre dans ce futur noir
et attirant à la fois.
Couplés
à une bande son excellente et dans l’esprit du premier film, mais avec une
touche de modernisme et une personnalité propre, les seuls visuels valent le déplacement
dans une salle obscure. En fait, le film aurait pu être mal joué et mal écrit
qu’on aurait tout de même pu l’apprécier d’un point de vue esthétique.
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N'est-ce pas une vue splendide ? Le film est aussi beau... |
Les personnages
soufflent le chaud et le tiède, quant à eux. Ainsi, le milliardaire incarné par
Jared Leto manque cruellement de caractérisation et paraît assez archétypal,
même s’il est bien joué. À l’inverse, le héros, K, joué par Ryan Gosling que
pourtant je n’apprécie guère, s’en sort très bien. La complexité de son
personnage interpelle et Ryan l’incarne avec justesse, surtout pendant les moments
de révélations. Mention spéciale pour Joi, une IA uniquement virtuelle, sorte d’Amazon
Home perfectionnée, qui crée chez le spectateur une grande empathie. On ne sait
jamais s’il s’agit d’un produit ou d’une personne, et pourtant on s’attache à
elle et on lui prête facilement des sentiments. On veut qu’elle ressente et qu’elle
soit vraie, on veut y croire, que ce soit la réalité ou une illusion. Les
questions que soulèvent ce personnage sont donc passionnantes et, au final, c’est
Joi qui répond le plus en profondeur au thème de l’univers : les androïdes
rêvent-ils de moutons électriques ? Bref, je ne m’attendais pas du tout à
cela et elle apporte bien plus que les méchants, trop stéréotypés.
Pour
conclure, il s’agit d’une œuvre magistrale, visuellement somptueuse, lente mais
dans le bon sens. Encore une fois, mention pour Joi, un personnage vraiment
réussi et qui intéresserait certainement Turing. Mais la poésie sombre, la
puissance thématique du premier s’échappe un peu. Tant pis, personne ne devrait
se priver de ses œuvres en dépit de cela, car la barre était haute. Villeneuve
a réussi son pari et, s’il n’égale pas le premier film de Scott, il s’agit d’une
suite excellente que Ridley n’aurait jamais pu faire lui-même.
Allez
le voir, si ce n’est déjà fait.