NB : jeu joué en langue japonaise et sous-titres anglais.
Pas de français à ce jour.
Qu’est-ce que c’est ?
Persona 5 est un jeu assez difficile à expliquer, mais je
vais tenter malgré tout de résumer le concept : vous jouez un lycéen, qui
arrive à Tokyo et intègre à sa nouvelle école, en rencontrant d’autres lycéens
et en participant à de multiples activités scolaires et périscolaires. Vous
aurez un aspect gestion du temps, où vous devez décider ce que votre
protagoniste fait, après l’école et pendant la soirée : est-ce qu’il
étudie pour réussir ses examens ? Est-ce qu’il va travailler dans un
convenient store ou dans une chaîne de burgers ? Est-ce qu’il va passer du
temps avec ses nouveaux amis, et en découvrir plus sur eux ?
Il dispose cependant d’un temps limité, qui rend difficile
de tout faire, et un peu comme un jeu de stratégie, vous avez un grand sens de
progression et avec toujours envie de voir la journée suivante. Pourquoi temps
limité ? Parce que le protagoniste, et quelques amis, se découvrent le
pouvoir de rentrer dans l’inconscient de personnes, souvent des criminels et des
ordures, dans le but de les « soigner » de désirs malsains qui font
du mal aux héros, à leurs proches, ou simplement à la société. C’est là que se
trouve l’aspect RPG : ces inconscients, appelés Palaces, sont
labyrinthiques et regorgent d’adversaires, un peu comme Inception (si vous vous
souvenez que les inconscients se protégeaient).
Voilà donc le cœur de Persona 5 : vous devez lutter
contre des hommes de pouvoir dans leur inconscient, tout en vivant une vie de
lycéen normal et en formant des liens avec vos connaissances, pour qu’ils
deviennent des proches.
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Une des covers |
Mon Avis :
Passons d’abord sur les parties les moins importantes à mes
yeux. Les graphismes sont chouettes, les personnages ont un chouette design et
les cinématiques, animées, sont de toutes beauté. On est très loin des ténors
de la PS4 et jamais vous ne verrez un visage aussi détaillé que dans Uncharted,
ou même Final Fantasy 13 (pourtant sorti jadis sur ps3). Les décors sont
sympas, mais sans plus. Bref, le côté artistique m’a plu, mais
techniquement, on ne voit pas bien la différence avec des jeux d’il y a 5 ans,
voire 10.
La bande-son, très importante, colle bien au thème du jeu et
à l’action, et l’écouter en boucle ne vous rendra pas fou (je dis en boucle,
car le jeu dure bien 100h, même en allant vite…). Certains thèmes de boss sont
entraînants. Bonne réussite.
Ex:
Au niveau des donjons, ceux-ci se révèlent assez classiques.
Nous sommes à des années-lumière d’un Dark Souls, et le design aurait encore
une fois pu apparaître sur ps3, voire ps2. Ils ne sont pas déplaisants pour
autant, se complètent en plusieurs fois (ce qui permet de faire des pauses en
cas de lassitude, pour aller à la salle de sport avec son best ou pour emmener
sa dulcinée au salon de thé), et servent le propos. Seul bémol, il est parfois
compliqué de sauvegarder, et il m’est déjà arrivé de passer plus d’une heure
sans croiser de point de sauvegarde.
Les combats, eux, m’ont plu. Certes au tour par tour, ils se
révèlent très dynamiques, et stratégiques. Plusieurs niveaux de difficulté
permettent de choisir ce que l’on souhaite, ainsi les hardcore gamers comme les
casuals y trouveront leur compte (je crois même qu’il y a une option pour ne
pas du tout faire de combat et juste profiter de l’histoire). Sans spoiler le
contexte, vous utilisez des attaques physiques et élémentaires (une dizaine de
types d’attaques), qui s’opposent à des résistances, ou à des faiblesses des
ennemis. Le but est ainsi de trouver la faiblesse de tous les ennemis présents,
de l’exploiter pour espérer faire un hold-up, qui permet en général de finir le
combat en un coup. Assez simple au début du jeu, cela gagne en complexité à
mesure que l’on avance. Chaque personnage dispose de son élément de
prédilection, et il faut savoir quand utiliser tel ou tel personnage… en
sachant que sa force est synonyme de faiblesse, car les ennemis aussi peuvent
exploiter celles-ci. Du coup c’est complexe, sans être ennuyeux. Le jeu, en
tout cas, fait un travail remarquable pour introduire petit à petit son système
de jeu et jamais on ne se perd.
Le système de progression vaut aussi le coup, et vous permet
de capturer certains ennemis, et d’en faire des Personas, vous accordant leur
pouvoir. Vous pouvez alors en collectionner, et en fusionner pour en créer de
nouvelles, avec leurs pouvoirs et leurs faiblesses. Cela devient vite addictif.
L’expérience :
Pour le gameplay, vous le voyez, quelques faiblesses,
quelques forces, et un jeu techniquement daté, mais sans être laid. Alors, qu’est-ce
qui en fait une merveille ?
Vous l’avez compris, je parle de l’histoire, du scenario,
comme des personnages, et plus globalement de l’expérience de jeu.
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Shibuya !! |
Sans spoiler, la trame principale est passionnante. Elle
commence sur des chapeaux de roues, et vous passez plusieurs heures de jeu sans
souffler, à découvrir les premiers personnages et les premiers donjons à un
rythme incroyable, où déjà le colossal du jeu se montre. Car souvent, les RPG
mettent un peu de temps, et vous passez de longs moments dans des quêtes
secondaires, à découvrir le monde. Pas de cela ici, l’histoire vous prend par
la main et vous jette sur l’autoroute, sans jamais perdre en intensité.
Finalement, vous ne pourrez souffler qu’au bout de nombreuses heures, et ce
sera le moment de découvrir un Tokyo plus vrai que nature, de Shibuya à
Shinjuku. Vous ferez plus ample connaissance avec des personnages, et
découvrirez leur personnalité.
Un mot sur les personnages : ceux-ci se dévoilent au
fur et à mesure de l’aventure et plus vous les comprenez, plus vous pouvez
admirer le travail des scénaristes pour les rendre plus vrais que nature. Les
interactions et les dialogues, nombreux, souvent doublés (pensez à télécharger
la voix japonaise avant de commencer une partie), sont savoureux et crédibles.
J’ai souvent rit devant leurs répliques, très bien écrites, et qui en font non
pas des personnages, mais des êtres humains. (en tant qu'auteur, c'est aussi un moment difficile. Je me suis rendu compte à quel point j'étais loin quand il s'agissait de caractériser des personnages. Il me reste beaucoup de chemin si j'espère un jour arriver à la cheville de ce qui est fait ici.)
Car ils sont la force de ce jeu : ils deviennent, peu à
peu, vos amis de lycée. Le personnage principal est assez peu caractérisé, et
ses réponses génériques. Cela ne pose aucunement problème, et permet de s’identifier
à lui facilement, et de se projeter. Dès lors, ses amis sont vos amis, et les
relations que vous entretenez avec eux paraissent très personnelles. Les
options de dialogues sont peu nombreuses, mais bien choisies et je me suis
rarement retrouvé à me dire : non, j’aimerais dire autre chose.
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Ann ! |
Les options de romance ne manquent pas non plus : vous
jouez un étudiant, et pouvez nouer une relation avec les autres membres de
votre groupe, ou avec des femmes plus âgées, qui vous aident en secret et qui
deviennent vos confidentes (hélas, pas de relation gay). Souvent, dans les
jeux, les romances sont des sortes de quêtes annexes, et une fois validées,
vous n’en entendez plus jamais parler. Ici, un effort supplémentaire a été
donné : vous pouvez toujours sortir avec votre love interest après la
scène ou vous déclarez vos flammes, et quelques scènes supplémentaires vous
rappellent de temps à autre que vous avez une relation particulière avec elle.
Par contre, le reste du cast ne s’en rend jamais compte et ne commente jamais,
ce que je comprends du point de vue des créateurs : cela demanderait pas
mal d’embranchements et de scènes alternatives. C’est néanmoins dommage, et j’espère
qu’un jour un jeu parviendra à vraiment aller au bout de la démarche.
En attendant, la relation qui s’est nouée dans ma partie, a
très bien marché, et elle a apporté un soutien moral au personnage bienvenu, vu
les épreuves qu’il endure.
Car oui, le jeu, dans son ensemble, aborde des thématiques
sombres, et nous entraîne du côté « ombre » de l’humanité. On
rencontre des cas de harcèlement, de violences, d’exploitation de la misère
humaine, de meurtre et de viol même. Parfois, le désespoir des personnages face
à des antagonistes cyniques et cruels se ressent, et pousse à la révolte et à
la réflexion, thèmes centraux du jeu. Sous le couvert de J-RPG pour
adolescents, un monde toutes en nuances se dessine, lourd de sens, et qui
pointe beaucoup de dérives et d’hypocrisie modernes.
Contre cette noirceur et les horreurs de l’inconscient, la légèreté
(dans le bon sens du terme) des personnages, porteurs d’un message humaniste et
feel-good, mais jamais crétin.
Pour conclure sur l’histoire, les liens qui se créent,
centraux au gameplay, vous attirent dans le jeu, d’une manière bien plus
efficace que le dernier kit de réalité virtuelle, si bien que lorsque l’expérience
se termine, c’est le cœur serré que vous quitterez vos nouveaux amis de lycée,
en les remerciant pour tout ce qu’ils vous ont apporté.
Une œuvre magistrale et marquante, que je conseille vivement.